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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

rien moins que sotte, elle avait peut-être compris, avec l’aide des admonestations de M. le curé, que l’on agissait avant tout pour son bien. D’autre part, cette petite fille n’était pas fâchée d’être devenue du jour au lendemain un personnage dont tout le monde s’occupait. Deux couturières travaillaient à son trousseau. On empila le linge fin et brodé dans ces caisses de fer-blanc, enfermées elles-mêmes dans un panier caraïbe, qui servent de malles aux colonies, malles incomparables sous le double rapport de l’élégance et de la légèreté ; on lit une caisse séparée de confitures de mangues, d’ananas, de tamarins, de citrons, de goyaves, en y ajoutant des oranges cristallisées, des noix d’acajou grillées, des sirops, des tablettes de coco et de pistaches, enfin des sucreries de toutes sortes. On emballa encore à part une splendide poupée noire, vêtue en capresse avec une tête de madras calendé, c’est-à-dire passé à la gomme et au jaune de chrome sur toutes les parties roses de l’étoffe, une chemise ornée de deux larges boutons doubles en or reliés par un anneau, une jupe éclatante, crânement relevée de côté dans la ceinture, des pendants d’oreilles gigantesques formés de cylindres juxtaposés et des colliers sans fin. Tous ces préparatifs, tous ces