Page:Bera - Double Histoire - Histoire d un fait divers.djvu/177

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grands soupirs, qu’elle était bien malheureuse, tandis qu’au fond elle ne l’était plus.

Cette pauvre enfant, à vrai dire, n’avait pas aimé. Mariée par ses parents à un homme fort amoureux d’elle, elle s’était mise à adorer son mari, comme font en pareil cas toutes les jeunes femmes, avec une spontanéité de décision qui fait certainement honneur à leur bonne volonté, mais plus encore à ce pouvoir surhumain qu’on appelle force des choses. Reconnaissance, devoir, intérêt, tous ces mobiles avaient créé l’illusion dans le cœur d’Emmy, et cette illusion-là peut durer toujours chez une honnête femme, quand son mari le veut bien. Mais enfin cet amour, brutalement imposé, que n’avaient point précédé des émotions plus hautes et plus chastes, il ne pouvait avoir de bien fortes racines. — Dans l’ordre moral aussi, la liberté seule est féconde et forte. Ce que nous avons nous-même choisi, seulement, devient nôtre.

Maintenant, elle sentait se réveiller en elle, sous le regard d’Olivier, toute une ni-