Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/162

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sent son assiette sous la table, et cela avec une constance si réjouissante qu’un domestique, placé derrière lui, le tira discrètement par la basque pour l’avertir.

— Bas les pattes, donc ! cria le chevalier, enchanté de trouver ainsi une diversion, et se tournant vers la comtesse, il ajouta :

— Cet animal est insupportable !

Mme de Vilanel fit un signe et le domestique se retira dans sa stupeur.

— Maintenant, mon ami, dit-elle, nous voilà seuls.

M. de Frileuse restait bouche béante. Cette fois pourtant il fallait bien parler. Il se leva, vint à la comtesse, lui prit le bout des doigts, et avec sa singulière tournure d’esprit ordinaire :

— Quel âge pensez-vous, comtesse, qu’eut le divin Ulysse quand il aborda dans Ithaque ?

— Oh ! chevalier ! fit la pauvre femme qui recula toute rouge.

— Je vous jure, madame, que vous vous méprenez ; car si je ne suis pas Ulysse, vous êtes à tout le moins Pénélope, et c’est là ce que je voulais dire. Or tout est là. Je n’avais jamais cru à Pénélope. La fidélité jusqu’à présent m’avait semblé l’apanage des chiens, té-