Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/270

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insurmontable, et si caractéristique chez les ouvriers de Paris, de tendre la main, même, et surtout, à la charité publique et administrative, et toute la tragédie enfin de la misère, de l’inique misère ! Il y a dans un coin du logis une jeune créature de Dieu, intelligente, aimante, brave. Si elle n’est pas très jolie, elle a d’admirables cheveux blonds, et tout, oh ! tout, plutôt que de les vendre comme les Auvergnates, au détesté « merlan » qui les guigne. Alors, elle les noue en torsade, y pique une épinglette de deux sous, se dresse, embrasse la maman et le môme, et, une, deux, trois, elle y va !… C’est Louisa.

« Non, il n’y a pas de malhonnêtes femmes, interjeta le président Mazèdes.

« — Il n’y a peut-être, observai-je, que de malhonnêtes sociétés. Mais l’histoire de Louisa, on la demande ?

« — Eh bien ! voici. Un jour où, Thémis m’ayant fait des loisirs, je les employais à jouer au bouchon avec les ablettes de la Marne, j’étais entré, pour me rafraîchir, dans un de ces cabarets à tonnelles qui bordent la rivière. Ils sont les oasis de nos caravanes fluviales, et l’attrait dominical des familles d’ouvriers en balade. Outre les berceaux de lierre et de vigne