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Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/286

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corbeille. Il la trouva aisément, dans l’ombre, à la place usuelle, la saisit, s’assit au bureau, le panier sur les genoux, et, ridicule vraiment, il eut honte en cette obscurité.

« Que veux-tu de la lettre infâme ? » lui criait dans la poitrine cette voix intérieure que nous y entendons tous, qui demande : « Oui ou non », sans plus, et veut une réponse. « Oh ! la détruire », fut la sienne, très sincère. Morte la bête, mort le venin ; il avait négligé de tuer le crapaud.

Un tour au bouton électrique, le cabinet s’éclaire, la corbeille verse toute sa paperasserie sur la table, voici la lettre. C’est bien elle. Ne l’aurait-il pas reconnue, du reste, la « circulaire » typographique aux mots collés, dans une charretée de chiffons ?

La relire ? A quoi bon, il la possède par cœur : « Ta femme te trompe. Un ami. » Sa femme, c’est Adèle. L’ami, qui est-ce ?… Peut-être importerait-il de s’en enquérir tout de même ? Et il la relit sous l’abat-jour, dans le rond lunaire qu’il projette. Allons, il ne faut rien détruire. C’est plus sage. On ne sait pas !…

Il replie la lettre, l’insinue dans son enveloppe, timbrée et datée par la poste, et il la