Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/307

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la force mâle de « l’antagoniste » doublée du désir impérieux, loi des sexes à laquelle les héroïnes de la vertu ne se soustraient que par la mort ou le meurtre. Puis le temps fit son œuvre, lente et sûre, et Irène oublia Jacques. Quant au mari, il était heureux, lâchement, et on ne l’est qu’ainsi peut-être.

Le 12 avril dernier, anniversaire toujours béni de leur mariage, au moment où, parmi les gerbes et les bouquets, Irène conduisait à table ses douze convives, parents et amis, une auto s’arrêta à la porte de la villa et un homme en descendit, qui, allègrement et d’un pas familier aux autres, vint droit au pavillon. C’était le treizième du festin.

— Jacques !…

Et Léon courut au vieil ami et lui ouvrit les bras.

— Toi ! toi ! quelle bonne surprise, et aujourd’hui encore !… Un 12 avril, notre fête !…

— On en revient donc, d’Amérique ? avait jeté Irène les lèvres serrées, mais sans émotion apparente et en lui tendant la main gauche qu’il retint dans un shake hand.

— Vous voyez, madame, même au bout de sept ans d’absence.

Dans cette pression de mains, il avait senti