Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/306

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par conséquent, rien ne serait arrivé de ce qui arrive, par hasard. Il suffirait que cela n’eût pas eu lieu.

Eh bien, cela n’aura pas eu lieu. Le père Noirot est vieux, atteint de la goutte, et il rêve d’aller mourir dans son pays, en Provence. On l’y enverra, sous un prétexte, avec une petite rente viagère, et le fait de la bague sera biffé des contingences avec la preuve, la seule, de ce qu’il prouve.

Quant au reste… tant pis. C’est peut-être d’un lâche ? Mais l’affaire est entre lui et sa conscience. Il aime Irène et il ne veut pas qu’elle souffre. Elle doit être absoute, puisqu’elle est belle. Oh ! ces cris, cette lamentation derrière la porte ! Non, non et non, et va pour un lâche. Il sera ce lâche. Et que tout se taise dans son âme brisée. Amen !

Huit jours après, le père Noirot, remercié, s’en retournait à Grasse pour y exhaler son âme au milieu des violettes et comme elles. La vie avait recommencé de couler paisiblement à la villa Rainville entre ces deux pauvres êtres que rongeait un commun secret qu’ils s’aidaient à garder l’un vis-à-vis de l’autre, comme des complices. Car Irène aimait son mari ; celui-ci avait deviné juste : elle n’avait succombé qu’à