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Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/328

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d’en face. L’ombre tombait autour d’elle. Un groupe d’une douzaine d’hommes, les parents du mort, les Gravona de souche ou d’alliance, se tenaient à l’arrière, en demi-cercle, comme des juges dans un prétoire.

— Que vous avais-je dit, nous fit l’hôtelier, regardez : pas de gendarmes ! Pourtant le meurtrier est chez lui, tout le monde l’a vu, et ils le savent. Mais l’arrêter, ils n’osent, c’est une querelle corse, nous les écharperions, la veuve la première et les cousins en tête.

Alors, la nuit étant tout à fait établie, Thérésa se détacha du groupe familial et marcha au perron de la maison ennemie. Elle avait à la main une branche de pin garnie encore de ses trois pommes en couronne, et qui brûlaient. Qu’allait-elle faire de ce brandon ?

Je ne pouvais croire qu’elle voulût mettre le feu à la demeure rivale, fût-ce pour contraindre le bandit à en sortir. Au moindre coup de vent c’était l’incendie dans Sartène. Pourtant elle allait, dans la fumée crépitante de la résine, la torche baissée, comme les anges exterminateur de la Bible. J’interrogeai don César d’un regard.

— Oui, répondit-il, vengeance de femme. Mais elles n’ont pas le fusil. Et puis, son gamin,