Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/327

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vous voyez. Je vous demande même la permission de vous brûler la politesse, car, de ces événements-là, il faut en être, et j’y vais.

Vous pensez si nous le suivîmes ! Je n’ai pas eu deux fois, dans ma vie, le spectacle qu’offrait ce labyrinthe de venelles, noires, étroites, tournantes, arc-boutées de contreforts, coupées d’échelles, de rampes et de bornes, où quelques vitres, sous les toitures, accrochaient les derniers rayons strabiques du couchant, tandis que la foule y débordait comme le torrent dans les ruisseaux. Grâce à don César qui nous menait à travers des logis en communication et même par des caves, nous parvînmes à une petite place rectangulaire, dessinée par l’écartement de deux maisons assez importantes, placées en vis-à-vis, hachées de meurtrières vermoulues et dont les fenêtres en guillotine semblaient les échauguettes de deux forts de frontière. Les Tafani et les Gravona s’épiaient les uns les autres de ces carreaux, depuis cent ans, comme les Montaigus et les Capulets de la Vérone shakespearienne.

Debout, au centre de cette plazzinette, et incomparablement belle dans sa capuce de veuve, une jeune femme de vingt ans, immobile, tragique et très simple, regardait la maison