Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/349

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

visiblement oppressé par le souvenir tragique, il fit quelques pas autour de son bureau en silence. Puis il s’arrêta devant un admirable portrait de femme, pastel rayonnant, qui illuminait tout son cabinet :

— Regardez, me dit-il, c’est elle, ma bien-aimée Suzanne, à l’âge qu’elle avait alors, vingt-cinq ans, dans toute sa floraison de beauté raphaélesque. Mais, sourit-il, en revenant à moi, je vais trop vite.

« J’avais fait un signe à mes deux aides improvisés et m’étais armé de la pince. Le concierge embrassa les jambes et le domestique les bras. S’ils le maintenaient trois minutes dans la position favorable, j’extrayais la balle ; le reste n’était plus qu’affaire de soins et question de cicatrice. Par une chance inouïe, la membrane tympanique était indemne. Quelques dents à remplacer, et, en un mois, Marécat reparaissait sur les boulevards, cigare au bec…. Hélas ! il n’y devait pas revenir, car il ne le voulait pas.

« Sous la double étreinte, ses forces se ranimèrent. Il se débattait, ruait, boxait, se cognait le front à la muraille.

« — Lâche !… me criait-il.

« A moi, lâche, son meilleur ami !… C’était