Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 1, 1911, 3e mille.djvu/168

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

épée et sanctionnait le verbe par le geste. Un duel fameux, à la Beaumanoir, où il avait fait honneur sur place à plusieurs adversaires consécutifs, l’avait campé en pleine lumière parisienne, et comme l’écrivain en lui avait la même valeur que le duelliste, la place de chef d’une rédaction lui allait comme de cire. En sus, Henry de Pène adorait les lettres et les lettrés, et l’accueil qu’il leur faisait mêlait tant d’urbanité à tant de bienveillance que je crois rêver quand je l’évoque. J’en citerai un trait tout à l’heure.

Émile Blavet était le secrétaire de rédaction et il reproduisait, en la multipliant, l’aménité de son chef de file.

Écrivait au Gaulois qui n’écrivait pas au Figaro ou qui, pour une raison ou pour une autre, rompait avec son maître un peu fantasque. L’un des chroniqueurs attitrés de la concurrence était Edmond About qui, naturellement, avait entraîné Sarcey dans son orbe. Il en résulta que, grâce à ce dernier, j’eus accès dans l’organe.

C’était le temps où son maître-reporter, l’allègre et bon vivant Armand Gouzien, musicien lui-même, organisait à la fois les premiers voyages d’initiés wagnériens et cette battue en Alsace, à la recherche du monstrueux Troppmann, qui est l’une des légendes du reportage. La randonnée de policier amateur qu’il menait dans les Vosges sur la bête féroce avait lancé Le Gaulois et par elle le papier de la rue du Helder faisait la pige au papier de la rue Rossini.

Le jour où, muni de la recommandation de mon ancien professeur, je me présentai aux bureaux du journal, il y avait dans l’antichambre trois personnes qui y parlaient à haute voix, avec des élancements