Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 1, 1911, 3e mille.djvu/209

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— C’est pour mon chien et mon chat.

Le samedi matin, en effet, mon « Cuirassier de Reichshoffen » carillonnait impérieusement à ma porte :

— C’est fait, hein ?

— Naturellement, là, sur la table, une jérémiade.

Et Coquelin emporta Le Maître d’École.

S’il y a des lecteurs qui s’intéressent aux souvenirs d’un vieux poète dont la vie n’offre d’autre drame que celui du labeur dans toutes ses luttes, je les renvoie, pour cette élégie du Maître d’École, aux lignes que lui a consacrées l’administrateur même de la Comédie-Française, Édouard Thierry, dans son mémorandum directorial. Ce qu’il ne dit point de la réussite du poème, c’est qu’elle faillit me fâcher avec Coquelin. À l’issue de la matinée, Mlle Favart, alors l’étoile du théâtre, était accourue m’embrasser dans le couloir du foyer et m’avait commandé, c’est le mot, une autre pièce lyrique, spéciale pour elle, et réservée, dont seule elle aurait le privilège. Même au prix dont le caissier les rétribuait, je gagnais à la lui offrir, car elle était la Muse même. J’écrivis donc un hymne à la France que je lui apportai le jour où elle était de service à l’ambulance créée par les dames sociétaires. Coquelin m’attendait dans l’escalier.

Très jaloux de « ses » poètes, il n’avait pas vu sans déplaisir sa charmante et illustre camarade marcher sur les plates-bandes de « son » jardin.

— Tu sais, fit-il, c’est bien simple, si tu n’es pas satisfait de ma façon de dire tes vers, je te lâche. Plus de Cuirassiers, plus de Maître d’École. Je ne vois pas ce que tu y gagnes.