Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 1, 1911, 3e mille.djvu/294

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et, depuis le départ de ce monsieur, ajouta l’autre, il jure contre vous comme un diable.

Sans me douter de mon crime, je montai résolument l’escalier où je trouvai la porte ouverte. Elle l’était toujours, du reste, car il aimait à aller de chambre en chambre chez tous les siens et à vagabonder, un chat sur le dos, dans sa famille.

— Ah ! te voilà, toi ! Assieds-toi et prends l’attitude requise. Du reste, je te tiens sous la pointe de mon cimeterre. À présent, réponds, de quel droit te permets-tu de me déshonorer sans mon consentement ?

Et d’un geste à la Frédérick il me montra, sur le pupitre en prie-Dieu qui lui servait de lutrin, une feuille de papier déployée.

— Regarde et lis.

— Eh bien, fis-je, c’est votre traité avec Patural pour l’Histoire du Romantisme. Nous l’avons fait, hier, ensemble dans son cabinet. Il est signé, bravo.

— Deux mots rayés nuls, monsieur !

— Lesquels ?

— Voici. Il y avait ici « …au prix de trois cents francs l’article ».

— Oui, je sais.

— Tu sais, toi ; mais moi, je ne veux pas.

Et il reprit, en faisant le moulinet de long en large avec le sabre turc :

— Du temps que j’étais jeune et beau, Girardin, dans La Presse, nous donnait, à Gérard et à moi, cinquante francs par feuilleton. Et c’était très bien payé, pour ta gouverne. Le jour où Buloz me versa cent bonnes livres sonnantes et trébuchantes pour l’insertion, dans la Revue, de mes Émaux et Camées