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Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 2, 1912.djvu/148

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— Je te l’achète, me cria Heredia, toujours enthousiaste.

Flaubert prit la croûte, s’assit, la contempla en silence, et, me la rendant assez nerveusement :

— Ça, c’est la gueule au père Sandeau. Tu peux la garder, si tu aimes cet auteur.

Or, ce fut cet « agrandissement » qui, six ans plus tard, lorsque le maître s’en alla, servit à Ernest de Liphart pour le superbe portrait à la plume que je publiai dans La Vie Moderne et qui reste le graphique unique à la fois et définitif de la tête auguste du grand artiste de lettres. Quant aux trois photographies, il y a cas de reliques ; je ne les montre qu’aux initiés du verbe.

À ce titre déjà, le poète Raoul Ponchon aurait droit à un tirage particulier des icônes, mais il le mérite en sus pour la joie romantique dont plusieurs de ses poèmes comblaient le maître. C’était François Coppée qui les lui avait révélés. Il y avait une parodie de l’Orientale de Victor Hugo, sur laquelle Flaubert tonitruait du « gueuloir » et crevait le plafond des ailes. Elle est établie sur le thème :

En venant du golfe d’Otrante
Nous étions trente.
Mais en arrivant à Cadix
Nous étions dix,

que le disciple développe ainsi pour l’allégresse des rimeurs

V’là qu’en arrivant à Melun
Nous n’étions qu’un.
Mais en sortant de Carcassonne
Zut, plus personne !…

— C’est gigantesque, clamait Flaubert en fichant l’index en terre comme un hydrographe qui marque