Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 2, 1912.djvu/162

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mologiste Fabre par la méthode de ses études ornithologiques. Mais en France il faut deux grands hommes pour une découverte, c’est le compte, et les seconds y sont les premiers.

Toussenel avait connu Leconte de Lisle en 1848, à La Démocratie Pacifique, feuille saint-simonienne, où ils avaient collaboré tous les deux, et rien, pour ma part, ne m’était plus doux que de les entendre égrener simultanément le rosaire de leurs souvenirs sur cette ère héroïque de la liberté française où je suis né. Ils gardaient l’un et l’autre un culte tendre pour l’un de ses martyrs, René de Flotte, beau gentilhomme breton, officier de marine et représentant du peuple, puis transporté du Deux-Décembre et tué enfin au service de Garibaldi, en Calabre, et tout ce qu’ils en contaient me sonnait et me sonne encore le « bayardisme » élégant sans peur et sans reproche de l’élite de notre race. Il me semble que celui qui écrirait l’histoire de René de Flotte comme la narraient Leconte de Lisle et Toussenel donnerait à la Démocratie le roman qui lui manque, ses Trois Mousquetaires en un, et j’en offre l’idée à qui voudra la prendre.

Une autre des causeries souvent réitérées du poète créole et du fouriériste chasseur avait trait aux animaux qu’ils aimaient à l’envi et connaissaient à fond. Leconte de Lisle disait l’éléphant, le jaguar, et le condor qui dort les ailes toutes grandes ouvertes ; Toussenel lui répondait par la caille, la perdrix et leurs amours buissonnières, et le thé sans thé se terminait par un éloge de Lamartine en qui l’ornithologue passionnel saluait l’idéal humain sur la terre. — Oui, concluait le maître du Parnasse, une individualité