Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 2, 1912.djvu/222

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

III

QUELQUES BOULEVARDIERS :

GUSTAVE CLAUDIN


Lorsqu’en proie déjà à ce mal agricole dont je mourrai et que, faute d’un nom médical mes amis appellent gaiement : ma bergerade, je me sentais tiré, comme Antée, fils de Neptune et de la Terre, c’est-à-dire invinciblement, par cet élément de la pomme de terre en qui est toute joie avec toute sagesse humaine, id est : — quand saoul du surmenage, du surchauffage et de toutes les frénésies de ma ville natale, j’assourdissais les miens par ce ranz des vaches en chambre dont l’hiver le plus rude ne calme point en moi l’éternelle élégie nostalgique ; — aux heures où la pelle, le râteau, le sarcloir, la brouette et les deux chers arrosoirs d’argent, vivifiés en Tentation de saint Antoine, s’adonnent dans mon crâne à des danses nocturnes de ballets de féerie, — je ne résistais au besoin de sauter dans le premier train qui sifflait gare Saint-Lazare qu’en me réfugiant au café Riche.