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Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 3, 1912.djvu/137

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La « folie » avait eu un succès extraordinaire. Tous les oléographes étaient accourus réclamer leur tambourin et, au bout de deux jours, il ne m’en était plus resté un seul à offrir à nos collaborateurs. Or, le matin même, Antoine Vollon m’avait apporté le sien, rien moins qu’une merveille.

— En avez-vous beaucoup comme ça ? s’était écriée Sarah « espatouflée », c’est le cas de le dire.

— Oh ! pour le moment, nous en attendons d’autres. Mais nous exposons déjà dans le hall, sous la garde du formidable Gonry, notre garçon de salle, ceux de Bonnat, Henner, Ribot, Boulanger, Manet, Stevens, Renoir, Duez, Worms, Madrazo, Rico, de Nittis, Boldini, Lewis-Brown et Clairin.

Jojotte a le sien ? Il ne m’a rien dit. J’en veux un, j’en veux un ! — Et elle étendait, impérative, son appui-main, comme un sceptre.

— C’est que, d’abord, nous ne voudrions pas abuser, glissait le subtil Zizi, et ensuite que nous portons, en vous quittant, le dernier à Meissonier…

— Cependant, fis-je.

Et elle n’eut pas à nous l’arracher, vous n’en doutez pas une seconde.

Les tambourins peints de La Vie Moderne ont été assurément, la trouvaille de mon consulat, et ils avaient lancé notre publication. C’est grâce à eux que nos rivaux mordirent la poussière à l’Hippodrome. Armée du marteau d’ivoire de Charles Pillet, Sarah en costume de doña Sol, et aidée de Bianca vêtue en Carmen, conduisait les enchères ; par son ardeur ensorcelée, elle évoquait l’image d’un chef d’orchestre hoffmannesque battant la mesure à des diables ; elle sombrait dans les fourrures, puis en