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Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 3, 1912.djvu/16

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gne, car elle regorge de peintres. Je ne puis malheureusement rien te dire cette fois de ce concours de pêche à la ligne, lutte surprenante, et l’une des choses qui valent ce voyage d’Anvers. Nous l’attendons avec une angoisse que tu comprendras aisément, attendu que la plus féconde imagination n’arrive pas à se représenter ce que cela peut bien être : un concours de pêche à la ligne ! Quoique bizarre déjà, le concours d’animaux reproducteurs se dessine plus nettement dans notre esprit.

Tout l’intérêt en ce moment se concentre sur la cantate de samedi prochain, cantate de mille exécutants et chanteurs. Il y aura là un bruit prodigieux, qui s’entendra des campines de la Zélande et y fera mugir sympathiquement les vaches endormies. Le cortège historique est divisé, paraît-il, en trois parties : la première figurera les origines de la ville ; la deuxième mettra en scène ses grands hommes ; la troisième sera consacrée à l’exaltation générale de la gloire d’Anvers. Comme je n’aurai pas sans doute le temps d’y assister, je vais te mettre tout de suite au courant de la légende populaire dont les personnages formeront le char des origines.

Il y avait une fois, c’était du temps de Julius Cæsar, un affreux géant saxon qui s’appelait Druon Antigon, dit l’histoire. Il habitait précisément Anvers ; son burg dominait l’Escaut, sur les eaux duquel il exerçait un droit de péage tyrannique et sanguinaire. Les navires qui remontaient le fleuve étaient contraints de lui payer des rançons proportionnées à leurs chargements. Ce méchant homme était d’ailleurs l’indigne père d’une charmante fille nommée Octroie, selon les uns, et Douane, selon les