Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 3, 1912.djvu/253

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Laffitte lui-même, je me rendis donc chez cet excellent Roux, rue Richer, où par chance et décret des dieux, Gaston Salvayre, pendu par les mains à un piano terrible, était en train de lui disputer sa vie. — Voilà, fit Roux, en lui plaçant sous les yeux le palimpseste. Te charges-tu de t’y reconnaître ? C’est pour le 14 juillet, un clou du Voltaire, ici présent.

Et Salvayre dit : — Comme chant, ce n’est pas mal, outrageusement du moins, mais pour ce qui est de l’harmonisation, c’est à renverser une seconde fois la Bastille ! — Jaloux ! lança Laffitte. — Et je chantai, d’abord debout et face à l’Érard mugissant puis en marquant le pas autour du salon, comme un régiment de Detaille. Laffitte me suivait en brandissant le simulacre de cent drapeaux en faisceau et Zizi, derrière lui, râlait, aux rimes, des gutturalités de serpent d’église.

— Diable ! fit Salvayre, il y a quelque chose. Donnez-moi ça et annoncez demain le « Chant des Drapeaux » au Voltaire.

Ce fut sur sa mise au point que le morceau fut donné, doctement « chérubinisé », si Cherubini est le maître de la doctrine. Le plus étonné fut Jean Richepin, je le présume, de voir, en développant son numéro, à quel Méhul l’associait le génie directorial de notre Jules Laffitte, qui, pour comble de civisme, avait magnifiquement dédié le tout, vers et musique à Léon Gambetta. — Et allez donc !

Telle est l’histoire de ce clou, la vraie, s’entend, car celle du boniment n’était faite que pour tromper le monde et elle sent trop sa grosse caisse pour que je la laisse s’accréditer dans les âges futurs et la