Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 4, 1913.djvu/66

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découragé d’attendre son heure au cadran de l’avancement, il avait quitté le théâtre et s’était jeté dans les tumultes vocifératoires de la Bourse. Sans doute, n’y avait-il pas mieux réussi que sous le lustre, car on le vit traîner assez misérablement de cafés en brasseries, sur la Voie Asphaltique, à la chasse dolente de quelque effigie de la République.

J’avais eu le plaisir de pouvoir l’occuper dans le lancement d’une brochurette hebdomadaire intitulée Le Don Quichotte où je m’étais essayé au rôle de lanternier et qui, grâce à son entregent, était allègrement partie. La réclamation, d’ailleurs fort juste, d’un confrère qui dirigeait lui-même, à Lyon, sous le même titre, une publication satirique et caricaturale, m’ayant forcé de modifier l’étiquette de mon petit pamphlet, le public dérouté cessa de me suivre et mon gérant s’effaça du giroscope de ma vie. À quelque temps de là, j’entrai au Figaro, où j’eus l’heur, grâce à mon masque shakespearien, de ne pas déplaire à la clientèle. J’allais, pendant dix années consécutives, un record de durée, tenir ma partie de fifre dans la musique de combat, à côté des Mirbeau, des Albert Wolff, des Ignotus, des Lavedan le père, et de ce triomphant Saint-Genest dont un article enlevait une souscription comme une redoute. Qui parle aujourd’hui d’Albert Durand de Bucheron qui, sous l’invocation du comédien martyr chanté par Rotrou, claironnait la réaction et le « machine-arrière » dans le style girardinesque, et dont Alphonse Daudet disait qu’il écrivait à cheval ? Il avait le faubourg Germain à ses pieds. Puis la chute des hommes du Seize Mai l’avait discrédité et, Villemessant disparu, la Participance le