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À PROPOS D’UN BALLET DE FAUST
UN MOT DE BEETHOVEN


L’idée de faire danser Faust est bien la plus prodigieuse qui soit jamais entrée dans la tête sans cervelle d’un de ces hommes qui touchent à tout, profanent tout sans méchante intention, comme font les merles et les moineaux des grands jardins publics, prenant pour perchoir les chefs-d’œuvre de la statuaire. L’auteur du ballet de Faust me paraît cent fois plus étonnant que le marquis de Molière occupé à mettre en madrigaux toute l’histoire romaine. Quant aux musiciens qui ont voulu faire chanter les personnages du célèbre poëme, il faut leur pardonner beaucoup, parce qu’ils ont beaucoup aimé et aussi parce que ces personnages appartiennent de droit à l’art de la rêverie, de la passion, à l’art du vague, de l’infini, à l’art immense des sons.

De combien de dédicaces Gœthe l’olympien a été affligé ! Combien de musiciens lui ont écrit : « Ô toi ! » ou simplement : « Ô ! » auxquels il a répondu ou dû répondre : « Je suis bien reconnaissant, monsieur, que vous ayez daigné illustrer un poëme qui, sans vous, fût demeuré dans l’obscurité, etc. » Il était railleur, le dieu de Weimar, si mal nommé pourtant par je ne sais qui le Voltaire de l’Allemagne. Une seule fois il trouva son maître dans un musicien. Car, cela paraît prouvé mainte-