Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/140

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

bémol de Félix Mendelssohn. On a généralement admiré la facture savante et le style ferme de ce morceau : « C’est d’un grand maître », disait Heller. Nous avons fait chorus en buvant de la bière ; puis est venue la sonate en la majeur de Beethoven, dont le premier morceau a arraché à l’auditoire des exclamations, des jurements, des cris d’enthousiasme ; le menuet et le finale n’ont fait que redoubler notre exaltation toute musicale, bien que les bouteilles de vin de Champagne fussent déjà en circulation.

Et quelqu’un a fait observer à ce sujet que la bonne bière était bonne, mais que le vin de Champagne valait mieux.

O vagabond infatigable ! quand reviendras-tu donc pour nous rendre ces nuits musicales que tu présidais si dignement ? Entre nous, il y avait trop de monde à tes réunions ; on parlait trop, on n’écoutait pas assez, on philosophait. Tu faisais une dépense affreuse d’inspiration qui eût donné le vertige à quelques-uns sans tous les autres.

Te rappelles-tu notre soirée chez Legouvé, et la sonate en ut dièse mineur, et la lampe éteinte, et les cinq auditeurs couchés sur le tapis dans cette obscurité, et notre magnétisation, et les larmes de Legouvé et les miennes, et le respectueux silence de Schœlcher, et l’étonnement de M. Goubeaux ? Mon Dieu ! mon Dieu ! que tu fus sublime ce soir-là ! Allons, j’oublie que j’appartiens à l’école des indifférents.

J’y reviens.

L’Exposition des produits de l’industrie nous a valu cette année des volumes de critique musicale ; on s’est beaucoup disputé, on a crié pour et contre les pianos, pour et contre