Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/21

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un peu triste d’aspect, doux et bon ; il se plaisait dans la solitude, pratiquait son art d’une façon désintéressée et charitable, et partageait sa vie entre l’étude et la surveillance de ses domaines. Il y est mort en août 1848, vénéré de tous, des petits surtout, qui n’avaient jamais vainement recours à ses conseils et à sa générosité.

S’il est souvent question, dans les Mémoires, du père d’Hector Berlioz, on ne fait qu’entrevoir sa mère ; elle se nommait Marie-Antoinette-Joséphine Marmion et avait épousé Louis Berlioz vers le commencement du siècle. Femme d’une piété ardente et d’une rigide honnêteté, elle craignit longtemps pour son fils les souffles empestés de la gloire profane ; elle chercha à le retenir au foyer des aïeux, impuissante à empêcher l’aiglon de briser sa coque et d’aller affronter la lumière à laquelle les ailes se brûlent parfois. Pauvre mère vigilante ! ses efforts ne furent pas entièrement perdus ; car si elle ne réussit pas à empêcher son fils de courir le monde, elle lui inculqua du moins l’amour de la patrie et du sol natal. L’enfant prodigue ne revint jamais aux lieux où ses premiers jours s’étaient écoulés sans pousser des cris d’admiration, provoqués par la beauté du pays, la douceur du climat, les réminiscences lointaines de la naissante aurore.

Vingt ans après, revenant d’Italie, il écrivait à madame Horace Vernet : « Les souvenirs du royaume de Naples sont restés impuissants contre l’aspect riant, varié, frais, riche, pittoresque, beau de masses, beau de détails, de notre admirable vallée de l’Isère[1]… » En descendant du Mont-Cenis, il s’était laissé aller à un véritable transport : « Voilà le vieux rocher de Saint-Eynard !… Voilà le gracieux réduit où brilla la Stella montis… ; là-bas, dans cette vapeur bleue me sourit

  1. Lettre du 25 juillet 1832. Vente des autographes du chevalier R…y. 30 novembre 1862.