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Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/229

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Sans doute, Liszt a raison en vous approuvant d’avoir accepté la position qui vous était offerte en Pologne ; en tout cas, il ne faut pas perdre de vue votre voyage à Paris, si vous pouvez le faire avec une complète indépendance d’esprit, eu égard au résultat financier des concerts. Je me fais une fête de vous mettre en rapports avec tous nos hommes d’art dont les qualités d’esprit et de cœur pourront vous rendre ces rapports agréables.

Vous savez si bien le français, que vous pourrez comprendre le parisien ; et vous trouverez peut-être amusant de voir comment tout ce monde d’écrivains danse sur la phrase, comment ceux qui osent encore accepter le titre de philosophes dansent sur l’idée.

Je serai tout à vous à mon retour, et fort désireux de connaître les compositions d’orchestre dont vous me parlez. Ma partition de Cellini ne saurait trouver un critique plus intelligent ni plus bienveillant que vous ; laissez-moi vous remercier d’avoir songé à faire, dans le livre de M. Pohl, le travail qui s’y rapporte. Au reste, cette œuvre a décidément du malheur ; le roi de Saxe se fait tuer au moment où on allait s’occuper d’elle à Dresde… C’est de la fatalité antique, et l’on pourrait dire à son sujet ce que Virgile dit sur Didon :

Ter sese attollens cubitoque adnixa levavit :
Ter revoluta toro est.

Quel grand compositeur que Virgile ! quel mélodiste et quel harmoniste ! C’était à lui qu’il appartenait de dire en mourant : Qualis artifex pereo ! et non à ce farceur de Néron qui n’a eu qu’une seule inspiration dans sa vie, le