Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/29

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élèves, nommé Gérono, qui taquinait les Muses à ses moments perdus, avait tiré du drame de Saurin, Beverley, une scène pour voix de basse, dont il avait confié les paroles à Berlioz ; nous ignorons quel était le librettiste d’un autre ouvrage sur le Passage de la mer Rouge, qui date de la même époque. Hector résolut de révéler au public ces premiers essais et songea à les produire dans une représentation à bénéfice au Théâtre-Français. Il fallait l’assentiment de Talma, le bénéficiaire. « L’idée de parler au grand tragédien, de voir Néron face à face » fit reculer Berlioz, qui n’était pas timide d’ordinaire. Ne pouvant réussir dans le profane, il se retira dans le sacré, écrivit une Messe qu’on faillit exécuter à Saint-Roch, puis qu’on exécuta tout à fait, grâce à la libéralité d’un riche amateur, qui paya les violons. Très-peu de journaux parlèrent de ce début, assez médiocre ; le style de l’ouvrage était une mauvaise imitation de la manière de Lesueur, et l’auteur, plus consciencieux ou plus difficile que la plupart de ses confrères, brûla son manuscrit. Un seul morceau, le Resurrexit, fut préservé des flammes : encore le compositeur l’a-t-il plus tard condamné sans rémission. Nul n’a eu la main plus prompte que lui dans ces sortes d’auto-da-fé ; il y a quelques années, on a vendu à l’hôtel Drouot l’unique exemplaire de l’opus 2 de Berlioz : la Danse des Ombres, ronde nocturne pour chant et piano. L’exemplaire était accompagné de la note ci-jointe : « Curiosité et rareté. Toute l’édition de l’œuvre 2 de Berlioz a été détruite par ses ordres[1]. »

Il prit part au concours pour le prix de Rome et ne fut pas même jugé digne d’entrer en loge. Cet échec alarma les

  1. Renseignements communiqués par M. le vicomte de Spoelberch de Lovenjoul.