Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/34

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de l’Opéra, m’a confié la composition de la musique de son ouvrage, à condition que M. le surintendant voudrait bien m’agréer. Si M. le surintendant veut connaître mes titres, les voici : j’ai mis en musique la plus grande partie des poésies de Gœthe ; j’ai la tête pleine de Faust et si la nature m’a doué de quelque imagination, il m’est impossible de rencontrer un sujet sur lequel cette imagination puisse s’exercer avec plus d’avantages…[1]. »

Pour parler ainsi à un grand de la terre, il fallait avoir reçu des preuves antérieures de sa bienveillance.

Le concert dans la salle du Conservatoire n’eut point lieu sans accidents. Alexis Dupont, l’un des solistes, fut pris d’un enrouement subit, la veille du concert, un trio avec chœurs fut chanté sans chœurs, par la faute des choristes qui manquèrent leur entrée ; quant à la cantate d’Orphée, qui figurait sur le programme, on se vit obligé de la supprimer, à cause des défaillances de l’orchestre. Nos virtuoses parisiens ont fait, sous le rapport de la science et du mécanisme, d’immenses progrès ; ils riraient bien aujourd’hui des difficultés qui ont arrêté l’archet de leurs ancêtres. Bien entendu, le concert ne rapporta rien à celui qui l’avait organisé ; mais M. Fétis, qui faisait autorité, dit, un soir, dans un salon, le dos tourné vers la cheminée et en se chauffant les jambes : — Voilà un début qui promet !… — Et cette parole de M. Fétis fut très-répétée.

Dès lors, on commença, dans le monde musical, à compter sur Berlioz ; on le considéra comme un élève qui prenait des licences fatales, qui s’affranchissait du joug et qu’il faudrait ramener à la vertu ; mais son prix de Rome, obtenu en 1830, au bruit du canon des barricades, n’étonna personne. Le prix, cette année-là, fut partagé entre deux concurrents ;

  1. Lettre autographe, vendue par M. Laverdet : 30 mars, 1863.