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Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/45

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dans Harold en Italie, il y avait une partie d’alto principal que Paganini se chargeait de jouer et dont il voulait essayer l’effet sur le public anglais, un jour, à un concert de la rue Vivienne, Berlioz se trouva en face d’un géant aux ongles crochus, à la mine livide, à la chevelure tombant sur les épaules ; ce géant l’embrassa en lui disant : — Tu Marcellus eris ! Tu seras Beethoven ! — C’était Paganini.

Comme nous le rappelions plus haut, les bienfaits du grand artiste ne s’arrêtèrent pas à cette démonstration théâtrale. Un dimanche, le 16 décembre 1838, Berlioz, riche de gloire, mais pauvre dans le vrai sens du mot (il avait dû payer les dettes de sa femme, qui s’élevaient à un chiffre assez respectable), donnait au Conservatoire une séance musicale dont nous transcrivons le programme exact : 1º Symphonie d’Harold. 2º Grand air de Marie Stuart, d’Alari, chanté par Madame Laty. 3º Le Pâtre breton, chanté par Madame Stoltz. 4º Cantando un di, de Bari, chanté par M. Boulanger et Mademoiselle Bodin. 5º Solo de violoncelle par M. Batta. 6º Scène de l’Alceste de Gluck, par M. Alizard et Madame Stoltz. 7º La Symphonie fantastique.

Paganini assistait au concert ; deux jours après, il écrivit à son protégé le billet suivant[1] :

« Mon cher ami, Beethoven mort, il n’y avait que Berlioz qui put le faire revivre ; et moi qui ai goûté vos divines compositions dignes d’un génie tel que vous, je crois de mon

  1. Mio caro amico, Beethoven estinto, non c’era che Berlioz che potesse farlo revivere ; ed io che ho gustalo le vostre divine composizioni, degne di un genio qual siete, credo mio dovere di pregarvi a voller accettare in segno del mio omaggio venti mila franchi i quali vi saranno rimessi dal signor baron de Rothschild, dopo che gli avrete presentato l’acclusa. Credete mi sempre, il vostro affetionatissimo amico. Nicolo Paganini. Parigi, le 18 décembre 1838.