Page:Berlioz - Les Grotesques de la musique, 1859.djvu/155

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prouver alors un sentiment d’humiliation et de se dire : Le plus stupide et le plus lourd des oiseaux, une oie, pourrait le faire, et je ne le puis !… Ô hommes, si fiers de vos découvertes, de vos engins producteurs et destructeurs, de vos relations familières avec la vapeur et la foudre, dont vous avez fini par faire vos esclaves à peu près soumises, inventeurs si bouffis de votre science, de vos calculs ; vous construisez des maisons roulantes, des palais flottants ; vous avez même fait servir les lois de la gravitation à élever jusqu’aux nues, par une contradiction apparente, de grands globes dont la puissance ascensionnelle aurait dû vous ouvrir la route des airs ; mais vous rampez encore, pourtant. Se traîner sur l’eau ou sur la terre, aidés par les vents ou par la vapeur, c’est toujours ramper. Et jusqu’au moment où vous aurez trouvé le moyen sûr de vous transporter librement dans l’espace, soit en volant, soit en dirigeant des navires aériens, des villes aériennes, malgré tout vous appartiendrez à la race des rampants, et vous n’en resterez pas moins d’ambitieuses chenilles, d’orgueilleux colimaçons.…

Contre l’un des murs de la modeste maison de Dorothée, à l’extérieur, était placardé au milieu d’une couronne de lauriers un quatrain en vers alexandrins de la muse silvestre, sur la visite que l’Empereur lui avait faite quelques jours auparavant.

« — C’est très-beau, mademoiselle, il y a là autant de cœur que de style. Sa Majesté a sans doute été bien satisfaite ?