Page:Berlioz - Les Grotesques de la musique, 1859.djvu/290

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nombreuse et composée exclusivement d’artisans et d’ouvriers. Elle a été fondée par M. Maniquet, dont le zèle, le talent et le dévouement à la rude tâche qu’il a entreprise, auraient dû depuis longtemps attirer sur lui et sur l’institution qu’il dirige les encouragements et l’appui énergique de la municipalité lyonnaise.

Un des acteurs du Grand-Théâtre, Barielle, dont la voix de basse est fort belle, chanta d’une façon remarquable ma cantate du Cinq mai. En somme, à l’exception de la Marche au supplice, trahie par la faiblesse des instruments de cuivre, le concert fut brillant sous le rapport musical et satisfaisant du côté… sérieux. Georges cependant aurait voulu qu’on se tuât pour y entrer ; et malgré les auditeurs qui étaient venus de Grenoble, de Vienne, de Nantua et même de Lyon, personne ne fut tué. Ah ! si monseigneur l’évêque eût annoncé en chaire que ma musique rendait les hommes meilleurs, sans doute la foule eût été plus compacte ; mais Son Éminence de Lyon s’est abstenue complètement. On n’a pas d’ailleurs tiré le moindre pétard en mon honneur, les cloches sont restés muettes… Le moyen, après cela, de faire les gens s’écraser à la porte d’un concert, au mois d’août, en province !… J’eus pourtant une sérénade à l’instar de Marseille, et deux lettres anonymes. La première, qui ne contenait que de grossières injures intraduisibles en langue vulgaire, me reprochait de venir enlever les écus des artistes lyonnais ; la seconde, beaucoup plus bouffonne, était de quelqu’un dont j’avais, sans m’en apercevoir, froissé