tre et quitter le poste important où l’attachait un si grand intérêt ? c’était difficile à concevoir.
Le ciseleur, néanmoins, se rendit au Baptistaire, où il trouva ses deux élèves Paolo et Ascanio, et des chevaux ; il devait partir le soir même pour Livourne, et de là s’embarquer pour Naples le lendemain.
Il attendait à peine depuis quelques minutes, quand Alfonso, le visage pâle et les yeux ardents, se présenta devant lui avec une sorte de calme affecté, qui ne lui était pas ordinaire.
— Cellini ! tu es venu, merci.
— Eh bien ?
— C’est ce soir !
— Je le sais ; mais parle, j’attends l’explication que tu m’as promise.
— Le palais Pitti, les jardins, les cours, sont encombrés. La foule se presse sur les murs, dans les bassins à demi pleins d’eau, sur les toits, sur les arbres, partout.
— Je le sais.
— Les Pisans sont venus, les Siennois sont venus.
— Je le sais.
— Le grand-duc, la cour et la noblesse sont réunis, l’immense orchestre est rassemblé.
— Je le sais.
— Mais la musique n’y est pas, cria Alfonso en bondissant, le maestro n’y est pas non plus, le sais-tu aussi ?
— Comment ! que veux-tu dire ?
— Non, il n’y a pas de musique, je l’ai enlevée ; non, il n’y a pas de maestro, puisque me voilà ; non, il n’y aura pas de fête musicale, puisque l’œuvre et l’auteur ont disparu. Un billet vient d’avertir le grand-duc que mon ouvrage ne serait pas exécuté. Cela ne me convient plus, lui ai-je écrit, en me servant de ses propres paroles, moi aussi, à mon tour, j’ai changé d’idée. Conçois-tu à présent la rage de ce peuple désappointé pour la première fois ! de ces gens qui ont quitté leur ville, laissé leurs travaux, dépensé leur argent pour entendre ma musique, et qui ne l’entendront pas ? Avant de