Page:Berlioz - Les Soirées de l’orchestre, 1854.djvu/372

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se compose ; la première fois elles sont écrites en blanches suivies d’une noire, et la seconde fois en noires suivies d’un soupir, ce qui en change le caractère.

Ensuite l’addition des deux mesures contestées n’est point du tout une anomalie dans le style de Beethoven. Il y a non pas cent, mais mille exemples de caprices semblables dans ses compositions. La raison que les deux mesures ajoutées détruisent la symétrie de la phrase, n’était point suffisante pour qu’il s’abstînt si l’idée lui en est venue. Personne ne s’est moqué plus hardiment que lui de ce qu’on nomme la carrure. Il y a même un exemple frappant de ses hardiesses en ce genre dans la seconde partie du premier morceau de cette même symphonie, page 36 de la petite édition de Breitkopf et Hartel, où une mesure de silence, qui paraît être de trop, détruit toute la régularité rhythmique et rend très-dangereuse pour l’ensemble la rentrée de l’orchestre qui lui succède. Maintenant je n’aurai pas de peine à démontrer que la mélodie de Beethoven ainsi allongé, l’a été par lui avec une intention formelle. La preuve en est dans cette même mélodie reproduite une seconde fois immédiatement après le point d’orgue, et qui contient encore deux mesures supplémentaires (ré, ut dièse, ré, ut naturel) dont personne ne parle ; mesures différentes de celles qu’on voudrait supprimer, et ajoutées cette fois après la quatrième mesure du thème, tandis que les deux autres s’introduisent dans la phrase après la troisième mesure. L’ensemble de la période se compose ainsi de deux phrases de dix mesures chacune ; il y a donc intention évidente de l’auteur dans cette double addition, il y a donc même symétrie, symétrie qui n’existera plus si on supprime les deux mesures contestées en conservant les deux autres qu’on n’attaque point. L’effet de ce passage du scherzo n’a rien de choquant ; au contraire, j’avoue qu’il me plaît fort. La symphonie est exécutée ainsi dans tous les coins du monde où les grandes œuvres de Beethoven sont entendues. Toutes les éditions de la partition et des parties séparées contiennent ces deux mesures ; et enfin, lorsqu’en 1850, à propos de l’exécution de ce chef-d’œuvre à l’un des concerts