Page:Berlioz - Les Soirées de l’orchestre, 1854.djvu/437

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Pauvre Tatéa, je crains bien que tu n’aies pas enfoncé le couteau assez avant !

Ceci n’empêche que je lui dise à travers l’Atlantique : Bonjour, mon cher Wallace, pensez-vous aussi que j’aie commis un abus de confiance en publiant votre odyssée ? Je parie que non.

P. S. Vous êtes un lecteur attentif, Corsino. Oui, il n’est que trop vrai, beaucoup d’erreurs typographiques ont été commises dans la première édition de nos Soirées, et quelques-unes se sont encore reproduites dans la seconde. Cela me cause un véritable tourment. Deux de ces fautes surtout m’exaspèrent. La première a l’air d’une raillerie dirigée contre moi. Elle consiste dans l’omission de la lettre h dans le mot orthographe ; omission qui me fait commettre une faute d’orthographe précisément dans le mot orthographe et dans une phrase où je reproche à quelqu’un une faute d’orthographe.

La seconde erreur est dans ces trois mots : boire le Kava. Elle est grammaticale et géographique. Il convenait d’abord d’écrire « boire du Kava. » De plus il faut n’avoir pas fait seulement un demi-tour du globe pour ignorer que Kava est le nom de la boisson en usage aux îles Carolines et à la Nouvelle-Zélande, mais qu’à Taïti, dont il s’agit dans le passage inculpé, cette même boisson se nomme Ava.

Je vais passer pour un canotier d’Asnières [1].

Mais qu’est-ce que ces fautes insectes en comparaison des monstres que nous voyons éclore journellement dans les imprimeries. Je ne veux vous en faire connaître qu’un ; il vous consolera, je pense, comme il m’a consolé.

Dans une revue littéraire de Paris, l’un de nos prosateurs les plus distingués publiait une Nouvelle. Cette Nouvelle contenait la phrase suivante, amenée je ne sais comment :

« L’on vit reparaître sur la planche le bocal de cornichons. »

  1. Quelle gasconnade ! le plus long voyage que j’aie jamais fait sur mer est celui de Marseille à Livourne. (Note de l’auteur.)