La raison principale de ce bizarre usage de traiter les timbales en instrument transporteur, était sans doute dans l’idée que s’étaient faite tous les compositeurs, que les timbales ne devaient donner que la tonique et la dominante ; quand on se fut aperçu qu’il était souvent utile de leur confier d’autre notes on dut en venir nécessairement à écrire les sons réels. Dans le fait, on accorde maintenant les timbales de toutes les manières possibles en tierce mineure ou majeure, en seconde, en quarte juste ou augmentée, en quinte, en sixte, en septième et en octave. Beethoven a tiré de charmants effets
de l’accord en octave Fa Fa | dans sa huitième symphonie, et |
dans la neuvième avec chœurs.
Les compositeurs se sont plaints pendant de longues années de la nécessité fâcheuse ou ils se trouvaient, faute d’un troisième son de timbales, de ne pas employer cet instrument dans les accords dont aucune de ces deux notes ne faisait partie ; on ne s’était jamais demandé si un seul timbalier ne pourrait pas jouer sur trois timbales.
Enfin, un beau jour, celui de l’opéra de Paris ayant démontré que la chose était facile, on osa tenter cette audacieuse innovation ; et depuis lors, les compositeurs qui écrivent pour l’opéra ont à leur disposition trois notes de timbales.
Il a fallu soixante-dix ans pour en venir là !…
Il serait mieux encore, évidemment, d’avoir deux paires de timbales et deux timbaliers, c’est ainsi qu’on a procédé dans l’orchestration de plusieurs symphonies modernes.
Mais le progrès ne marche pas si vite dans les théâtres, il faudra bien quelques vingt-cinq ans encore pour y obtenir celui-là.
On peut employer autant de timbaliers qu’il y a de timbales dans l’orchestre de manière à produire à volonté, suivant leur nombre, des roulements, des rhythmes et de simples accords à deux, à trois, ou à quatre parties. Avec deux
paires, si l’une est accordée en La ♮ Mi ♭ | par exemple, |
et l’autre en Ut Fa | on pourra, avec quatre timbaliers, faire |
entendre les accords suivants à deux, à trois et à quatre parties :
Sans compter les Enharmoniques comme : |
pour produire, dans le ton de Ré ♭ min., l’accord : |
Ou celui-ci, en Ut ♯ mineur : | et l’avantage d’avoir au moins |
une note à placer dans presque tous les accords qui ne s’éloignent pas trop de la tonalité principale.
C’est ainsi que peur obtenir une certaine quantité d’accords à trois, quatre, et cinq parties plus ou moins redoublées, et en outre un effet saillant de roulements très serrés, j’ai employé dans ma grande Messe des morts huit paires de timbales accordées de différentes manières, et dix timbaliers.