donner la moindre accolade à la pauvre jeune
fille, regagne sa place suant et confus. Cette fois
on applaudit à outrance, on rit aux éclats ; c’est
un bonheur, un délire : c’est le beau moment de
la séance académique, et je sais bon nombre d’amis
de la joie qui n’y vont que pour celui-là. Je
ne parle pas ainsi par rancune contre les rieurs,
car je n’eus pour ma part, quand mon tour arriva,
ni père, ni mère, ni cousine, ni maître, ni
maîtresse à embrasser. Mon maître était malade,
mes parents absents et mécontents ; pour ma
maîtresse Je n’embrassai donc que M. le Secrétaire-Perpétuel
et je doute qu’en l’approchant
on ait pu remarquer la rougeur de mon front ,
car, au lieu d’être nouveau tondu, il était enfoui
sous une foret de longs cheveux roux, qui, avec
d’autres traits caractéristiques, ne devait pas
peu contribuer à me faire ranger dans la classe
des hiboux.
J’étais d’ailleurs, ce jour-là, d’humeur très-peu embrassante ; je crois même n’avoir pas éprouvé de plus horrible colère dans toute ma vie. Voici pourquoi : la cantate qu’on nous avait donnée à mettre en musique finissait au moment où Sardanapale vaincu appelle ses plus belles esclaves, et monte avec elles sur le bûcher. L’idée me vint d’écrire une sorte de symphonie descriptive de l’incendie, des cris de ces femmes mal résignées, des fiers accents de ce brave vo-