Page:Bernède - La Ville aux illusions, 1936.djvu/101

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
99
LA VILLE AUX ILLUSIONS

ne m’offre rien de séduisant et dès que je perds de vue mon clocher, je me sens tout chose…

Ils sortirent dehors.

— Nous allons rentrer ensemble… reprit l’abbé Murillot, car je descends aussi à la station Saint-Placide. Je suis à l’hôtel des Pays Bas… Tu connais peut-être ?

— C’est tout près de chez moi…

Ils prirent le métro, en bavardant de choses indifférentes. Jean tint à accompagner l’abbé jusque devant l’hôtel. Puis, les deux hommes se firent leurs adieux.

— Ne reviendrez-vous pas, monsieur l’abbé ? demanda Jean d’une voix implorante.

— Je ne le pense pas… Mais c’est toi qui retourneras à Gréoux, mon petit… J’ai confiance !

Il secoua la tête :

— Je ne le crois pas.

— Bah ! bah ! un jour, tu comprendras que c’est là qu’est le bonheur… ton bonheur… Crois-tu que tu ne serais pas mieux au grand air des champs qu’à pousser ta charrette ? Mais je ne veux pas insister : tu y viendras de toi-même… Tu verras… Allons, à bientôt !

— Au revoir, monsieur l’abbé ! Ne manquez pas d’aller faire une petite visite à mes vieux, au pays !

— J’y avais déjà pensé.

— Mais… ajouta-t-il, avec un peu d’embarras, ne leur dites pas tout ce que je vous ai raconté…

— Eh bien ? dis-donc ! tu as une jolie opinion de ma discrétion !…

— Ni ce que je fais à Paris…

— Compte sur moi, mon garçon… J’ai des trésors de diplomatie en réserve…

Il secoua une dernière fois la main du jeune homme en riant, lui lapa affectueusement sur l’épaule, puis, de son grand pas brusque, entra dans l’hôtel.

Jean le suivit des yeux. Enfin, lorsqu’il eut disparu, il tourna les talons et revint pensivement chez lui.