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LA VILLE AUX ILLUSIONS

lains de Gréoux : 19, avenue Hoche… Il ne connaissait pas encore le quartier, mais pensait que ce devait être bien.

Il se rendit à son restaurant habituel et déjeuna. Quand il sortit, il n’était encore qu’une heure et demie !

— Je ne peux pas me rendre si tôt chez eux, pensa-t-il. Ils ont à peine fini leur repas, sans doute !

Il partit dans cette direction, à pied, en flânant. L’air était doux et la mauvaise saison semblait encore lointaine. Dans le ciel, d’un bleu délavé, des petits nuages passaient, mollement bercés… Les feuilles des marronniers se recroquevillaient comme des petites pattes frileuses et les acacias prenaient des teintes de rouille d’or…

— Les vendanges sont faites, là-bas, pensa Jean, et papa doit préparer les terres pour les semailles prochaines…

Il chercha la bonne odeur de la terre entr’ouverte et la grande brise tiède qui soufflait, venant de Camargue… Mais il n’y avait, dans la rue que des relents de poussière et d’essence…

— Décidément, Paris ne sent pas bon ! pensa-t-il en souriant.

Il avait traversé la Seine et suivait l’avenue des Champs-Élysées.

Dans un assourdissant brouhaha, les autos se poursuivaient ou s’entre-croisaient, dominées par la masse des autobus, qu’il ne put s’empêcher de comparer à des éléphants au milieu d’un troupeau de fauves…

Sur les trottoirs, des promeneurs allaient et venaient, jouissant de cette belle journée, tandis que des enfants, ivres d’espace et de relatif grand air, poussaient des cris de joie en se bousculant. Des jeunes femmes élégantes marchaient de ce pas vif et léger, caractéristique des Parisiennes, le nez au vent, le sourire aux lèvres. Des couples, penchés l’un vers l’autre, allaient plus lentement, se confiant mille secrets que les pierrots cueillaient au passage ; des