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LA VILLE AUX ILLUSIONS

ployé qui était chargé de l’affaire, et enfin, se retrouva aux environs de la mairie, où des curieux stationnaient déjà.

— Qu’est-ce qu’il y a donc ? demanda-t-il à un petit télégraphiste qui portait sans doute des dépêches peu pressées.

— C’est une gonzesse de la haute qu’épouse un vicomte, répondit le gamin. Paraît que c’est un mariage tout ce qu’il y a de chic… Si tu veux les voir, ils vont arriver…

— Où le mariage est-il béni ? questionna-t-il, les tempes bourdonnantes.

Le gamin le regarda avec étonnement.

— Tu lis donc pas les journaux ? Tiens, regarde-ça ! Ça te donnera aussi le tuyau que tu cherches.

Il lui tendit un journal du matin. En première page, le portrait des fiancés surmontait un entrefilet où l’on annonçait le mariage de Mlle Fousseret, « fille du financier bien connu » et du vicomte des Aubrays. La bénédiction nuptiale devait être donnée aux jeunes époux dans l’église Saint-Augustin.

C’était tout près. Jean chercha à se débarrasser de son encombrante charrette. Il remonta avec elle la rue du Maréchal-Foy, et dans la rue de Monceau, trouva ce qu’il cherchait : un gamin qui flânait, les mains dans les poches et le nez au vent. Il l’arrêta :

— Dis-donc, petit, veux-tu gagner quarante sous ?

Les yeux du gosse s’allumèrent.

— Quarante sous, que vous dites ? Bien sûr ! Qu’est-ce qu’il faut faire ?

— Pas grand’chose ! Garder ma voiture pendant une demi-heure pendant que je vais faire une commission…

— Entendu, mon prince ! Mais, ajouta-t-il, méfiant, payez d’avance !

— Tu as un fichu toupet ! Tiens voilà vingt sous ; tu en auras autant quand je reviendrai.

— Ça colle !

Il lui tendit une pièce et s’éloigna à grands pas.