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LA VILLE AUX ILLUSIONS

— Désespéré ? Pour quelle cause ?

Le jeune homme baissa la tête. Il fallait parler d’Arlette.

— Je suis allé voir les Fousseret, monsieur l’abbé, ils ont une fille… Arlette…

— Ah ! ah ! fit l’abbé Murillot qui commençait à comprendre.

— Je suis sorti avec elle, quelquefois… Elle semblait me trouver sympathique… Les parents m’invitaient constamment…

— N’insiste pas ! fit l’ecclésiastique en hochant la tête. Je vois très bien ce qui est arrivé… La jeune fille devait être coquette, aimait à badiner, à recevoir des compliments… Et toi, gros dindon, tu t’es laissé prendre à son jeu…

— Oh ! monsieur l’abbé !

— Quoi, quoi ? Évidemment ! C’est bien ce dont je t’avais prévenu… Tu arrivais tout neuf de ta province… n’ayant jamais rien vu. Et ingénument, tu t’es imaginé que les Fousseret, dix fois millionnaires, allaient l’offrir leur fille en mariage, hein ? Ni plus ni moins…

— Je l’aimais ! soupira-t-il.

— Tu l’aimais… Ah ! jeunesse ! Et lu crois que ça suffit d’aimer une jeune fille pour pouvoir l’épouser ? Tu n’as pas réfléchi que même si elle avait répondu à tes sentiments, jamais sa famille n’aurait donné son consentement, voyons ! Il y a des distances qu’on ne peut pus combler…

— Je le sais bien… maintenant…

— Et alors, au lieu d’agir en homme, tu as fermé les yeux, tu t’es dit : « Pourquoi pas ? » et tu as continué à courir chez eux, hein ?

— Oui…

— Comment le pot-aux-roses s’est-il découvert…

— J’ai été malade… J’ai eu la fièvre typhoïde, cet hiver.

— Tu ne l’as pas écrit chez toi ?

— Non… Je ne voulais pas les inquiéter…

L’abbé Murillot haussa les épaulés avec pitié.