ma deuxième syncope, je me suis trouvé sur ce lit, mon idée a été sûrement de fuir, fuir à tout prix. Je me rappelais ma chute dans le soleil, devant l’enclos de M. Dumouchel. C’était pire. Je ne me rappelais pas seulement le chemin creux, je voyais aussi ma maison, mon petit jardin. Je croyais entendre le grand peuplier qui par les nuits les plus calmes s’éveille bien avant l’aube. Je me suis figuré bêtement que mon cœur s’arrêtait de battre. — « Je ne veux pas mourir ici ! ai-je crié. Qu’on me descende, qu’on me traîne n’importe où, ça m’est égal ! » J’avais certainement perdu la tête, mais j’ai quand même reconnu la voix de mon pauvre camarade. Elle était à la fois furieuse et tremblante. (Il discutait sur le palier avec une autre personne.) — « Qu’est-ce que tu veux que je fasse ? Je ne suis pas capable de le porter tout seul, et tu sais bien que nous ne pouvons plus rien demander au concierge ! » Alors j’ai eu honte, j’ai compris que j’étais lâche.
Il faut d’ailleurs que je m’explique ici une fois pour toutes. Je vais donc reprendre mon récit au point où je l’ai laissé quelques pages plus haut. Après le départ de mon camarade, je suis resté seul un bon moment. Puis j’ai entendu chuchoter dans le couloir et enfin il est entré, tenant toujours sa boîte au lait à la main, très essoufflé, très rouge. — « J’espère que tu dîneras ici, m’a-t-il dit. Nous pourrons causer en attendant. Peut-être te lirai-je des pages… C’est une