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Page:Bernanos - Journal d’un curé de campagne.djvu/88

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digieux, que veux-tu ! Tellement beau ! Dieu ne méprise rien. Après tout, si l’affaire avait marché, Judas aurait probablement subventionné des sanatoria, des hôpitaux, des bibliothèques ou des laboratoires. Tu remarqueras qu’il s’intéressait déjà au problème du paupérisme, ainsi que n’importe quel millionnaire. « Il y aura toujours des pauvres parmi vous, répond Notre-Seigneur, mais moi, vous ne m’aurez pas toujours. » Ce qui veut dire : « Ne laisse pas sonner en vain l’heure de la miséricorde. Tu ferais mieux de rendre tout de suite l’argent que tu m’as volé, au lieu d’essayer de monter la tête de mes apôtres avec tes spéculations imaginaires sur les fonds de parfumerie et tes projets d’œuvres sociales. De plus, tu crois ainsi flatter mon goût bien connu pour les clochards, et tu te trompes du tout au tout. Je n’aime pas mes pauvres comme les vieilles Anglaises aiment les chats perdus, ou les taureaux des corridas. Ce sont là manières de riches. J’aime la pauvreté d’un amour profond, réfléchi, lucide — d’égal à égal — ainsi qu’une épouse au flanc fécond et fidèle. Je l’ai couronnée de mes propres mains. Ne l’honore pas qui veut, ne la sert pas qui n’ait d’abord revêtu la blanche tunique de lin. Ne rompt pas qui veut avec elle le pain d’amertume. Je l’ai voulue humble et fière, non servile. Elle ne refuse pas le verre d’eau pourvu qu’il soit offert en mon nom, et c’est en mon nom qu’elle le reçoit. Si le pauvre tenait son droit de la seule nécessité, votre égoïsme