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Page:Bernanos - Les Grands Cimetières sous la lune.pdf/111

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SOUS LA LUNE

salaud. Imaginez que nos catholiques aient pris au sérieux, en 1936, les phrases sur l’explosion du sentiment catholique dans la catholique Espagne, nous ne serions encore qu’au début de notre Sainte Guerre. Moins riches en effectifs étrangers que nos voisins, nous devrions envisager, derrière le généralissime Moreau de la Meuse, une nouvelle guerre de Cent ans.

Qu’on ne me fasse pas l’injure de me croire plus sensible qu’un autre. J’avoue à ces dames que la vue du sang ne m’excite pas, soit d’horreur, soit de plaisir, ou même de simple curiosité, mais c’est probablement que je ne dispose pas, comme elles, de l’organe capable de transmettre à l’écorce cérébrale, ces sortes de démangeaisons. La discrète réserve physiologique qu’on vient de lire ne doit pas s’interpréter ainsi qu’un aveu de faiblesse, ou c’est une faiblesse commune à tous les individus de mon sexe. J’ai vu beaucoup mourir. Peut-être ma place était-elle marquée dans les modestes fosses de la dernière guerre, aux côtés de mes compagnons. Je n’en regarde pas moins s’ouvrir, sans aucun vertige, les immenses charniers de demain. Voilà bien longtemps que les révolutionnaires vrais ou faux, abusent de la mystique terroriste. Le terrorisme ne leur appartient nullement. Ils se vantent. À la vérité, l’histoire nous démontre que le système sert à tout le monde,