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Page:Bernanos - Les Grands Cimetières sous la lune.pdf/193

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SOUS LA LUNE

vous avez volés, les mots magiques — justice, honneur, patrie — comme les toros de corrida dans la cellule ténébreuse, figuration dérisoire de l’étable sombre et fraîche, mais qui ne s’ouvrira plus pour eux que sur l’arène sanglante. Les mots que vous avez volés débouchent maintenant eux aussi sur la guerre. Hé bien ! mourir pour mourir, je ne crois sûrement pas que nous mourions dans vos rangs. Nous mourrons revêtus de notre peau, de notre vraie peau, et non pas de vos défroques sinistres. Nous pourrirons tranquillement dans notre peau, la nôtre, sous la terre — notre terre — la terre que vos saletés de chimistes n’ont pas encore eu le temps de sophistiquer — pourvu il est vrai, que les services d’hygiène ne nous aient pas préalablement arrosés d’essence et transformés en noir animal ou en goudron.