Page:Bernanos - Scandale de la vérité.djvu/59

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pauvres diables, d’avoir prétendu associer les pauvres diables, le petit peuple, à leurs délectations moroses. Le respect que je sens pour la mémoire de Maurice Barrès ne peut m’empêcher d’écrire que le nationalisme a été inventé pour résoudre des cas de conscience plus littéraires que politiques, fournir d’une foi humaine, d’une religion humaine, des gens de lettres déchristianisés ou pour mieux dire déshumanisés (c’est la même chose) jusqu’à la racine de l’âme. Dans cet antique pays chrétien, il est à la fois risible et sinistre de voir un petit nombre de philosophes, d’esthètes imposer par la plume, la parole, l’action publique, leurs propres débats intérieurs à de braves gens qui depuis des siècles n’avaient jamais eu besoin de se confirmer par un système dans leurs fidélités naturelles. Pour réconcilier avec leur patrie une génération d’intellectuels pourris de renanisme, on a profondément scandalisé un vieux peuple plein d’honneur et de bonhomie qui a toujours pensé qu’une saleté est une saleté, parût-elle ou non favorable à l’intérêt national, qui ne prend pas la politique pour une école de candeur,