Page:Bernanos - Scandale de la vérité.djvu/83

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Je n’étais pas vendu à Coty, j’étais vendu tout court, vendu par ministère d’huissier, jeté à la rue pour trois termes impayés, comme un simple étudiant, mésaventure que le vieux Drumont a eu le tort de redouter toute sa vie et à laquelle il n’a d’ailleurs échappé que par la mort.

À ceux qui se demandent pourquoi j’ai quitté mon pays pour le Brésil, je pourrai dire que je suis venu ici cuver la honte. La honte accable les uns, réduit les autres au désespoir. Je suis de ces derniers. Je ne veux pas cesser d’écrire, de témoigner pour ce que j’aime. Je sens bien que la honte et le dégoût m’eussent réduit à l’impuissance, ou à la haine, qui est impuissance pure, la forme démoniaque de l’impuissance. Tel Français qui s’abandonnerait en France, trouve la force de relever la tête, de faire front, il sait ce qu’il représente, lui, pauvre diable, il ne peut pas céder, il ravale Doriot et Blum, il ravale Tardieu et Jouhaux, il ravale Maurras et Flandin, il ravale même M. Céline, il ravale tout, il ne peut pas vomir en public. À cette distance, parmi