Page:Bernard - Brutus.djvu/10

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le coûte infiniment.

Ce qui me doit faire ſentir combien j’aurois hazardé en donnant un courage plus dur à Brutus, c’eſt la difficulté que quelques gens ont euë de gouter celuy de Titus, qui vient s’accuſer luy-meſme, & demander le ſupplice ; cependant la dureté qu’on a pour ſoy-meſme doit être plus aiſément ſupportée que celle qu’on a pour les autres. Je prie que l’on conſidere que Titus a toute la vertu imaginable, que s’il s’oublie dans un inſtant, & dans des circonstances qui ne luy laiſſoient pas l’uſage libre de ſa raiſon, ſi-toſt qu’il eſt revenu à luy-meſme, il doit avoir horreur du crime où il eſt tombé, qu’il ſent un poids dont il faut qu’il ſe ſoulage ; qu’enfin il ne peut ſe reconcilier avec luy-meſme qu’en effaçant à ſes propres yeux, comme à ceux des autres, par un aveu public de ſa trahiſon, l’infamie de ce qu’il a fait.

Ceux qui ont trouvé de l’indignité à venir demander de mourir ſur un échafaut, n’ont ſans doute pas ſongé que cette honte même eſt ce qui fait ſa gloire, puiſqu’il la ſubit volontairement, parce