Page:Bernard - Brutus.djvu/31

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AQUILIUS.

Seigneur, j’ay raſſemblé cinq cens jeunes Romains,
Qui ſe ſont dévoüez à ſervir nos deſſeins ;
Un des fils de Brutus, Tiberinus luy-même,
Sans peine a conſpiré pour des Princes qu’il aime.
Plus que les nœuds du ſang une étroite amitié,
Avec les fils du Roy l’avoit toûjours lié.
De nos Maîtres nouveaux l’inflexible rudeſſe
A choqué les eſprits d’une libre jeuneſſe
Et tous avec les Rois veulent voir de retour
Les plaiſirs, la licence, & l’éclat d’une Cour.
Mais à cette hardie & nombreuſe Cohorte
Il manque de pouvoir diſpoſer d’une porte.
Si l’aîné de Brutus vouloit ſe joindre à nous,
Dés cette même nuit Rome ſeroit à vous.
Pour un ſuccés aiſé nôtre deſſein demande
La porte Quirinale ; & Titus y commande.

OCTAVIUS.

N’avez-vous rien tenté, Seigneur, pour l’engager ?
Au party de Tarquin ne peut-on le ranger ?

AQUILIUS.

Il adore ma fille. Et peut-être par elle
À Titus pour le Roy j’inſpireray mon zele.
D’un cœur qu’elle poſſede elle ſçait le chemin.
Je veux qu’elle luy parle en faveur de Tarquin,
Et la faiſant entrer dans cette confidence,
Je pretens de l’amour employer l’éloquence.
Inſtruite du ſecret depuis hier ſeulement,
Elle ignore l’effort qu’on veut de ſon Amant.
Pour rendre encor plus ſûr l’effet que je deſire,
Par degrez elle-même il faudroit la conduire.

OCTAVIUS.

Une Amante à toûjours l’art de perſuader,
Mais par elle un ſecret pourroit ſe hazarder.