Page:Bernard - Brutus.djvu/34

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Ha ! ſi mes ſentimens oſent icy paroître,
Je le hais, & ma haine eſt injuſte peut-être ;
Mais j’ai fait pour la vaincre un inutile effort,
Et s’il m’obtient de vous, vous me donnez la mort.

AQUILIUS.

Ma fille, un tel Epoux ne doit point vous déplaire,
Il auroit plus d’éclat s’il n’avoit point de frere ;
Il eſt vrai que Titus, plus grand, plus glorieux
Du Peuple & du Senat attire plus les yeux.
Ces Illuſtres Romains que nous tâchons de ſuivre,
Tous nos Heros en luy ſemblent devoir revivre ;
Mais ſi Tiberinus ne le peut égaler,
Par de moindres vertus on peut ſe ſignaler,
Et mon engagement…

AQUILIE.

Et mon engagementCiel ! m’auriez-vous promiſe !
Mon Pere, à quels deſtins me verrois-je ſoumiſe !

AQUILIUS.

Non, je n’ai rien promis, & ſuis plus engagé,
Tiberinus m’oblige, & n’a rien exigé ;
Mais lié d’intereſt, il a droit de prétendre
Que s’il eſt vôtre amant, je le prendrai pour gendres.

AQUILIE.

Ainſi mon ſeul ſecours eſt dans mon deſeſpoir.

AQUILIUS.

Vos injuſtes douleurs ont ſur moy du pouvoir,
Mais malgré ma raiſon, s’il faut que je leur cede ;
Aux maux que vous craignez je ne voy qu’un remede.
Si Titus vous aimoit ſon cœur… vous rougiſſez,
Votre rougeur augmente, & m’en aprend aſſez.
Vous l’aimez ; Je le voy ; mais parlez, Aquilie.
Un Pere vous l’ordonne ; Il fait plus ; il vous prie.