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obstacles que rencontre la méd. expérimentale.

L’invention scientifique réside dans la création d’une hypothèse heureuse et féconde ; elle est donnée par le sentiment ou par le génie même du savant qui l’a créée.

Quand l’hypothèse est soumise à la méthode expérimentale, elle devient une théorie ; tandis que, si elle est soumise à la logique seule, elle devient un système. Le système est donc une hypothèse à laquelle on a ramené logiquement les faits à l’aide du raisonnement, mais sans une vérification critique expérimentale. La théorie est l’hypothèse vérifiée, après qu’elle a été soumise au contrôle du raisonnement et de la critique expérimentale. La meilleure théorie est celle qui a été vérifiée par le plus grand nombre de faits. Mais une théorie, pour rester bonne, doit toujours se modifier avec les progrès de la science et demeurer constamment soumise à la vérification et à la critique des faits nouveaux qui apparaissent. Si on considérait une théorie comme parfaite et si l’on cessait de la vérifier par l’expérience scientifique journalière, elle deviendrait une doctrine. Une doctrine est donc une théorie que l’on regarde comme immuable et que l’on prend pour point de départ de déductions ultérieures, que l’on se croit dispensé de soumettre désormais à la vérification expérimentale.

En un mot, les systèmes et les doctrines en médecine sont des idées hypothétiques ou théoriques transformées en principes immuables. Cette manière de procéder appartient essentiellement à la scolastique et elle diffère radicalement de la méthode expérimentale. Il y a en effet contradiction entre ces deux procédés de l’esprit. Le système et la doctrine procèdent par affir-