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obstacles que rencontre la méd. expérimentale.

d’assurance trompeuse et une inflexibilité qui s’accorde mal avec la liberté et la souplesse que doit toujours garder l’expérimentateur dans ses recherches. Il faut donc éviter avec soin toute espèce de système, et la raison que j’en trouve, c’est que les systèmes ne sont point dans la nature, mais seulement dans l’esprit des hommes. Le positivisme qui, au nom de la science, repousse les systèmes philosophiques, a comme eux le tort d’être un système. Or, pour trouver la vérité, il suffit que le savant se mette en face de la nature et qu’il l’interroge en suivant la méthode expérimentale et à l’aide de moyens d’investigation de plus en plus parfaits. Je pense que, dans ce cas, le meilleur système philosophique consiste à ne pas en avoir.

Comme expérimentateur, j’évite donc les systèmes philosophiques, mais je ne saurais pour cela repousser cet esprit philosophique qui, sans être nulle part, est partout, et qui, sans appartenir à aucun système, doit régner non seulement sur toutes les sciences, mais sur toutes les connaissances humaines. C’est ce qui fait que, tout en fuyant les systèmes philosophiques, j’aime beaucoup les philosophes et je me plais infiniment dans leur commerce. En effet, au point de vue scientifique, la philosophie représente l’aspiration éternelle de la raison humaine vers la connaissance de l’inconnu. Dès lors les philosophes se tiennent toujours dans les questions en controverse et dans les régions élevées, limites supérieures des sciences. Par là ils communiquent à la pensée scientifique un mouvement qui la vivifie et l’ennoblit ; ils fortifient l’esprit en le développant par