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du raisonnement expérimental.

fait, sans quoi il courrait le risque de s’égarer. Dans les deux exemples précédents l’homme s’avance sur des terrains différents et dans des conditions variables, mais n’en marche pas moins par le même procédé physiologique. De même, quand l’expérimentateur déduira des rapports simples de phénomènes précis et d’après des principes connus et établis, le raisonnement se développera d’une façon certaine et nécessaire, tandis que, quand il se trouvera au milieu de rapports complexes, ne pouvant s’appuyer que sur des principes incertains et provisoires, le même expérimentateur devra alors avancer avec précaution et soumettre à l’expérience chacune des idées qu’il met successivement en avant. Mais, dans ces deux cas, l’esprit raisonnera toujours de même et par le même procédé physiologique, seulement il partira d’un principe plus ou moins certain.

Quand un phénomène quelconque nous frappe dans la nature, nous nous faisons une idée sur la cause qui le détermine. L’homme, dans sa première ignorance, supposa des divinités attachées à chaque phénomène. Aujourd’hui le savant admet des forces ou des lois ; c’est toujours quelque chose qui gouverne le phénomène. L’idée, qui nous vient à la vue d’un phénomène, est dite à priori. Or, il nous sera facile de montrer plus tard que cette idée à priori, qui surgit en nous à propos d’un fait particulier, renferme toujours implicitement, et en quelque sorte à notre insu, un principe auquel nous voulons ramener le fait particulier. De sorte que, quand nous croyons aller